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25 févr. 2022

Meg Corbyn, Tome 2 : Volée Noire.


Titre : Meg Corbyn, Tome 2 : Volée Noire.
Auteur : Anne Bishop.
Genre : Bit-lit.
Edition : Milady.
Nombre de page : 477 pages.
Prix : 8.20€.


Résumé :

 GRÂCE À SON DON DE CLAIRVOYANCE, Meg Corbyn a gagné sa place auprès des dangereux terra indigene de Lakeside. Lorsque l'apparition d'une nouvelle drogue violente et addictive remet en cause le pacte fragile entre Autres et humains, la petite ville est de nouveau plongée dans la tourmente. Les aptitudes de Meg devraient permettre à Simon Wolfgard, dirigeant métamorphe de l'enclos, d'éviter un bain de sang. Mais encore faut-il pouvoir déchiffrer ses visions à temps. D'autant que l'homme qui veut récupérer la prophétesse se rapproche, mettant en péril les vies de tous ceux qui la considèrent à présent comme l'une des leurs.


Extrait :

 Pourtant, elle n'était pas seule lorsqu'elle avait éteint la lumière quelques heures plus tôt. Quand elle avait sombré dans le sommeil un gros Loup velu était couché à côté d'elle.
Agrippant autant de draps et de couvertures qu'elle put, elle les remonta sous son menton et se rallongea.
- Simon ? chuchota-t-elle.
Un grognement lui parvint, semblant provenir du sol, de l'autre côté du lit. Puis une tête humaine apparut, et les yeux d'ambre de Simon Wolfgard se posèrent sur elle, traversés de reflets rouges. Signe incontestable qu'il était furieux.
- Tu es réveillée, maintenant ? gronda-t-il.
- Oui, répondit-elle timidement.
- Bien.
Elle eut juste le temps d'apercevoir des muscles fins et de la peau nue - nue ! - avant qu'il se glisse sous les draps. Elle se détourna, le coeur battant sous l'effet d'un tout autre genre de peur.
Il ne dormait jamais avec elle sous forme humaine. Jamais. Pourquoi le faisait-il à présent ? Voulait-il... coucher avec elle ? Elle n'était pas... Elle n'avait pas... Elle n'était même pas sûre de pouvoir, avec... Mais s'il s'attendait à ce que... ?
- S... Simon ? lança-t-elle, un tremblement dans la voix.
- Meg ?
Dans sa voix à lui perçait un grondement.
- Tu n'es pas un Loup.
- Je suis toujours un Loup.
- Mais tu n'es pas un Loup avec de la fourrure.
- Non. Et tu prends toutes les couvertures.
Sur ces mots, il attrapa les draps auxquels elle s'accrochait et tira dessus d'un coup sec, de sorte qu'elle roula jusqu'à lui. Avant qu'elle ait eu le temps de décider comment réagir, Simon avait rabattu les couvertures sur eux, la plaquant contre lui.
- Arrête de gigoter, lui ordonna-t-il d'un ton bourru. Si tu me donnes un autre bleu que celui que j'aurai à la hanche, je te mords.
Elle se figea, mais pas en raison de la menace. Dans son sang nageaient des prophéties et des visions qui se libéraient lorsque sa peau était entaillée. Simon le savait et ne lui causerait pas la moindre égratignure. Cela étant, durant les deux semaines qui venaient de s'écouler, il avait appris à la pincer à travers ses vêtements en serrant les mâchoires assez fort pour lui faire mal sans la blesser. Discipline de Loup adaptée à sa nature particulière de cassandra sangue.Elle était arrivée par hasard dans l'Enclos de Lakeside sept semaines auparavant, transie de froid et à la recherche d'un travail. Simon avait régulièrement menacé de la dévorer les premiers jours, ce qu'il évitait de faire avec ses autres employés, ces derniers ayant tendance à réagir en s'enfuyant après avoir rédigé leur démission. Mais, quand les terra indigene avaient découvert qu'elle était une prophétesse du sang et qu'elle tâchait d'échapper à son propriétaire, ils avaient choisi de la traiter comme l'une des leurs. Et de la protéger comme l'une des leurs, surtout depuis qu'elle était tombée dans la rivière glacée et avait manqué de se noyer en tentant d'éloigner ceux qui cherchaient à s'emparer de Sam. Raison pour laquelle Simon veillait sur elle toutes les nuits, roulé en boule à côté d'elle, depuis qu'elle était sortie de l'hôpital.
Si elle n'avait pas autant apprécié la chaleur fournie par le corps velu du Loup, cette intrusion dans sa vie privée l'aurait davantage dérangée.
Était-ce pour cela qu'il faisait toujours si froid dans son appartement ? Pour éviter qu'elle se plaigne de la compagnie de Simon ? Il ne lui était même pas venu à l'idée de protester, car Simon était un Loup. Sauf qu'à présent il ne ressemblait pas à un animal et qu'avoir Simon sous forme humaine à côté d'elle sous les draps lui paraissait... différent. Déroutant. Menaçant, dans un sens qu'elle n'avait aucune envie d'expliquer.
Quoi qu'il en soit, velu ou non, il lui tenait toujours chaud, ne faisait rien de spécial, et il était encore trop tôt pour songer à se lever, alors il faudrait qu'elle... réfléchisse... demain.
Le sommeil commençait à la gagner quand Simon la secoua légèrement et demanda :
- Qu'est-ce qui t'a fait peur ?
Elle aurait dû savoir qu'il ne renoncerait pas si facilement. Et peut-être avait-il raison. Son don de prophétie avait évolué depuis qu'elle s'était échappée de l'institution et vivait avec les Autres. Elle était devenue plus sensible, au point qu'elle n'avait pas toujours besoin de se couper pour avoir des visions, surtout si celles-ci la concernaient.
Les images s'estompaient. Elle avait déjà oublié certaines parties du rêve qu'elle avait fait, elle le savait. En garderait-elle un quelconque souvenir au réveil ? La simple perspective de se remémorer ce cauchemar suffit à la faire frissonner.
- Ce n'était rien, affirma-t-elle en tâchant de s'en convaincre elle-même. Juste un rêve.
Même les prophétesses du sang faisaient des rêves ordinaires, non ?
- Ça t'a fait assez peur pour que tu m'éjectes du lit. Ce n'est pas rien, Meg. (Les bras de Simon se resserrèrent autour d'elle.) Et pour ton information, malgré ta petite taille, tu rues comme un original. Ce que je dirai aux autres Loups.
Super. Tout à fait ce qu'il lui fallait. Oui, c'est notre agent de liaison. Meg l'original.
Mais le Loup dominant et chef de l'Enclos qui se trouvait à côté d'elle attendait une réponse.
- J'ai entendu un bruit, murmura-t-elle. Un bruit que je connaissais, mais que je n'ai pas réussi à identifier.
- Un bruit que tu avais entendu en cours ? demanda-t-il d'une voix aussi basse qu'elle, faisant allusion aux leçons qui lui avaient été dispensées à l'institution dans le dessein de l'amener à reconnaître ce qu'elle voyait ou entendait dans les prophéties.
- En cours, mais ici aussi. Et ce n'est pas un son isolé, mais une multitude de sons qui, ensemble, ont une signification propre.
Simon observa un silence songeur.
- D'accord. Quoi d'autre ?
Elle frissonna. Il se serra aussitôt contre elle, et elle se sentit mieux. En sécurité.
- Du sang, souffla-t-elle. C'est l'hiver. De la neige recouvre le sol, et elle est tachée de sang. J'ai aussi vu des plumes. (Elle tourna la tête vers Simon.) C'est pourquoi j'ai essayé de crier, d'attirer l'attention de quelqu'un. J'ai vu des plumes noires brisées dans la neige écarlate.
Simon la dévisageait.
- Tu les as vues ? Il ne faisait donc pas nuit ?
Elle réfléchit un moment, puis secoua la tête.
- Non. Il n'y avait pas beaucoup de soleil, mais il faisait jour.
- As-tu reconnu l'endroit ?
- Non. Je ne me souviens d'aucun détail susceptible de préciser le lieu, à part qu'il y avait de la neige.
Simon tendit le bras au-dessus d'elle pour éteindre la lumière.
- Dans ce cas, rendors-toi, Meg. Nous traquerons cette proie demain matin.
Il se coucha à côté d'elle et sombra instantanément dans le sommeil, exactement comme lorsqu'il se trouvait sous forme de Loup. Sauf qu'il ne se trouvait pas sous forme de Loup et qu'elle ne savait pas comment lui dire que le fait qu'il dorme dans son lit sous l'aspect d'un homme avait changé quelque chose entre eux.


Avis :

 Après un premier tome proche du coup de cœur, je n’ai pas résisté longtemps pour découvrir la suite de cette saga à l’univers très particulier. On retrouve Meg, une prophétesse de sang et les Terra Indigene, des créatures de Namid. Dans « Volée noire » deux intrigues sont présentes, celle sur le Contrôleur et celle sur le groupe Les Humains Avant Tout — HAT. Un volume beaucoup moins consistant offrant pourtant des informations denses, de ce fait, je me suis parfois détachée du récit. Néanmoins, l’ensemble de l’œuvre est addictif ; les rebondissements et révélations s’enchaînent et ne laissent aucun répit. Quelquefois le rythme s’éteint, en cause, des changements de perception réguliers cédant un goût amer ; les scènes passionnantes sont coupées pour soulever des précisions. Cette suite semble plus désorganisée, heureusement, les dialogues permettent d’harmoniser la narration de temps en temps complexe. Anne Bishop délivre un roman vif, sur des notes émotionnelles inattendues en bit-lit et une sphère imaginée atypique. Le tout, accompagné par des personnages attachants, des relations donnant lieu à un fort intérêt et une guerre entre les humains et les Autres, détentrice de messages enrichissants.

L’héroïne, Meg, est toujours pleine de surprises. Elle me fait vivre des sentiments, elle me fascine de plus en plus au fil de l’histoire. Cependant, sur ce tome, je l’ai trouvé absente en comparaison du précédent. Du coup, sa personnalité est moins mise en valeur pour attribuer de la place au caractère des autres personnages du roman. Heureusement, je me suis déjà prise d’affection pour elle dans « Lettres écarlates », c’est une jeune femme étonnante dans sa façon d’être, de penser, de réagir. Elle est une lumière auprès de son entourage, une guide, une liseuse d’avenir et une arme pour changer le monde et les opinions. Meg découvre la vie dans l’Enclos de Lakeside, elle se fait accepter facilement et protéger d’une main de fer. Pourtant, sa puissance ne permet aucun doute, son courage et ses capacités font d’elle une redoutable combattante, de plus elle est très créative et ses visions lui offrent des possibilités infinies. Le danger de la mort rôde autour de cette protagoniste, j’éprouve une peur immense de la perdre ; à chacune de ses nouvelles entailles, elle s’approche fatalement de son dernier souffle. Un suicide par sacrifice, lent et inconnu.

Simon devient dans cette séquence un personnage beaucoup plus important, son côté secret est toutefois toujours d’actualité. Un héros révélateur de sentiment pour les humains, malgré son âme de prédateur. Il est plutôt pudique, et doute de plus en plus de lui-même et de ses devoirs de chef. Ses attitudes paraissent encore disproportionnées, et son incompréhension envers les femmes est plutôt amusante. Un homme-loup, plus proche de l’animal que de l’humain. Pour moi, cet être est un mystère, je suis dans l’impossibilité de le cerner totalement. Peut-être que ses indécisions laissent planer des ombres sur son tempérament, et ne consentent pas à révéler son cœur ou ses émotions. En vérité, Simon sait nous mettre dans tous nos états, c’est le genre d’homme séduisant, protecteur, meneur et réservé envers ce qu’il ressent. Il caresse sans cesse mon attention, sa manière de fonctionner, son besoin d’être flatté, son comportement joueur, son masque énigmatique et son image d’homme invincible voulant des câlins. Il est différent, un peu étrange et je l’apprécie beaucoup pour ces deux raisons ; aussi le fait qu’il soit insaisissable est captivant et provoque un appétit d’en savoir davantage sur ce protagoniste, à part des autres.

Les personnages secondaires ne sont plus tout à fait les mêmes, ici, ce sont plutôt les policiers de Lakeside, Burke et Monty ; ils sont agréables et instinctifs. Ils savent où est leur place, ils sont prêts à aider les Autres en dépit de leur dangerosité et des événements agressifs de la part de leurs semblables. Ils veulent se faire leur propre idée sur les Terra Indigene. Je regrette le départ de Sam, bien évidemment, ce petit garçon fait invariablement partie de l’Enclos, sauf qu’il est mis à l’écart sur ce scénario. J’ai tout particulièrement apprécié Merri Lee, très proche de Meg ; son caractère est doux et sauvage, un beau mélange sur une femme très simple et capable d’apporter un équilibre à l’héroïne. Vlad est un vampire se manifestant fréquemment dans le récit, sa sagesse est une bouffée d’air frais ; sans m’attacher à lui, je le trouve prudent et réfléchi, essentiel pour calmer Simon ou ses alliés.

Sur ce second volume, l’intrigue est moins travaillée, et elle manque aussi d’action. Les recherches et découvertes se positionnent en différence, occasionnant épisodiquement des longueurs. Deux mois après la tempête, Simon et Meg vivent une nuit déconcertante pour eux et ils vont se questionner sur leur relation pendant plusieurs jours. Ce duo titille de plus en plus ma curiosité, étant hors du commun dans ce genre. Une amitié très ambiguë, entre réticence et bien-être mutuel ; ils se sentent sereins ensemble, dans la compagnie de l’un et de l’autre. Seulement, des barrières notables condamnent en grande partie un rapprochement, malgré les sentiments qu’ils éprouvent chacun de leur côté en silence. On est assidûment et assurément dans un univers inédit, entre fantastique, fantasy, thriller et supposément romance paranormale. Le cœur de l’histoire est original, très étudié sur les éléments et le déroulement des trames. Le mystère se fait intense, sur beaucoup d’aspects, dont le lien entre nos deux héros principaux, le futur de Meg, sur le Contrôleur et les institutions des Prophétesses de sang, sur les drogues et leurs effets et enfin sur la guerre latente entre les Autres et les humains voulant conquérir le monde. De plus, les révélations s’introduisent au bon moment, dans les bons contextes et ne cessent d’approfondir le suspense. Les émotions envoûtent entièrement, elles se composent avec harmonie au récit, et rajoutent un pouvoir ; celui de plonger le lecteur ailleurs, de l’emporter facilement. À la fin de ce tome, j’éprouve distinctement de la peur, de l’inquiétude pour Meg et énormément d’espoir pour tous les personnages. Je ressens l’amitié indéfectible entre eux, les oscillations de chacun et les préoccupations variées. Les péripéties ne se succèdent pas, elles se déversent sur un même accord et malgré le peu d’animation, je me suis perdue dans mille et un éblouissements.

L’écriture de l’auteure est dynamique, avec les alternatives se modifiant inlassablement ; ces changements de points de vue sont nécessaires ; or, ils fournissent des censures freinant l’enrichissement sur certains passages. Sur ce volume, le rythme est légèrement entrecoupé et peut à l’évidence gêner l’incursion dans ce monde déjà élaboré. Anne Bishop n’est pas sans restes dans les détails, et, malgré des confusions, son talent pour développer les paysages, les personnages, et les incidents ne fait aucun doute. Le style est à la troisième personne du singulier, sa rédaction est innovante ; en effet, elle retransmet des sentiments par le biais de sa narration omnisciente. Anne Bishop est remarquable dans son imagination et ses aptitudes à faire vivre ses créations aux lecteurs, une artiste des mots se différenciant par une écriture raffinée dans le genre bit-lit.

Un deuxième tome ayant une diminution dans le nombre de pages, toutefois, les renseignements ne faiblissent pas. « Volée noire » est très légèrement en dessous du précédent ouvrage de la saga, impliquant moins de rebondissements et des perspectives excessivement diverses. Néanmoins, je suis éloignée de la déception, c’est une continuation à « Lettres écarlates » parfaitement sensée, où les personnages commencent à prendre des décisions fortes et montrent leur autorité. Meg marque mon esprit, en dépit de la négligence envers elle ; son caractère s’aiguise. Une héroïne admirable, elle est très naturelle et sait être catégorique dans ses choix et ses paroles, elle mène sa barque idéalement et librement. En différence, Simon est bien plus existant dans cette suite, valorisé par ses pensées et ses sentiments ; en tant que leader de l’Enclos et sa nature de loup, difficile de se confier sur ses propres réflexions. Il est amusant, charmant et troublant, éventuellement j’ai souffert pour lui et ses hésitations. La relation entre ses deux êtres est forcément le point fort, délivrant une singularité et des frémissements. Une intrigue mêlant surnaturel, politique et conflit, sur des vagues émotionnelles. L’originalité escorte le suspense, les éclaircissements s’avèrent plus nombreux en comparaison du premier, et la conception de Anne Bishop est sans précédente. Le dénouement est concluant, satisfaisant ; une bataille sans embûches, je me sens juste sur ma faim. Une plume soignée, malgré tout, l’auteure est plus concise et irrégulière dans le tempo. Je devine encore des éclats et émerveillements avec « Meg Corbyn », les prochains volets vont sûrement me révéler de l’inattendu. Je visionne une modernité frénétique dans cette saga.


Note :
9/10.

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