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21 févr. 2021

Coup de foudre à Manhattan, Tome 1 : Nuit blanche à Manhattan.


Titre : Coup de foudre à Manhattan, Tome 1 : Nuit blanche à Manhattan.
Auteur : Sarah Morgan.
Genre : Romance.
Edition : Harlequin.
Collection : &H.
Nombre de page : 477 pages.
Prix : 8.50€.


Résumé :

Un nouveau projet, une nouvelle vie, et le ciel de Manhattan pour seule limite.

 Même si l'entreprise d'événementiel qu'elle vient de lancer avec ses deux meilleures amies est encore au point mort, Paige veut y croire. Mieux, elle a un plan : ne plus jamais laisser la peur de l'échec la paralyser, manger sainement et se tenir aussi loin que possible de Jake Romano - aussi connu sous le nom de « Celui qui lui brisa le cœur ». À partir d'aujourd'hui, Paige ne pense plus au passé, seulement à l'avenir. Sauf que, dès sa première commande, son passé et son avenir se télescopent violemment.


Extrait :

 La porte de son bureau s'ouvrit et il leva les yeux, sourcils froncés, irrité d'être interrompu dans ses pensées.
- Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ?
Dani lui jeta un regard scrutateur mais ne fit pas de commentaire.
- J'ai quelqu'un ici qui voudrait te parler.
- Je n'ai aucun rendez-vous noté pour aujourd'hui.
- Elle dit s'appeler Paige.
Dani s'adossa contre la porte pour commenter à voix basse :
- Cette fille a eu un comportement bizarre. Elle est restée au moins dix minutes dehors à hésiter. Deux fois, on l'a vue s'éloigner sur le trottoir, et deux fois, elle a fait demi-tour et elle est revenue. On la regardait faire par la fenêtre et les paris étaient ouverts : entrera ? entrera pas ? Peut-être que tu es poursuivi par une érotomane perverse ? Tu veux que je lui dise de partir ?
Toute son équipe pensait, à l'évidence, qu'il s'agissait d'une de ses ex, venue régler ses comptes.
- Non, ne la renvoie pas.
- Tu sais pourquoi elle est là ?
Non. Mais il le devinait sans peine. Il ne savait pas ce qui le dérangeait le plus : le fait que Paige se soit décidée à lui demander de l'aide ou le fait qu'elle ait eu, à l'évidence, autant de mal à s'y résoudre.
***
- Dis-lui d'entrer. Je peux la recevoir tout de suite.
Il n'avait pas besoin de se demander pourquoi Paige avait failli tourner les talons par deux fois. Il le savait. Demander de l'aide lui coûtait déjà en soi. Et lui demander de l'aide à lui était tout particulièrement une torture pour elle.
***
- Jake ?
Sa voix qui l'appelait depuis la porte. Un peu voilée. Féminine. Une voix qui glissait sur lui comme la caresse d'un gant de fourrure.
Il se prépara mentalement à l'épreuve. Tout ce qu'il avait à faire, c'était la traiter comme la petite soeur de son meilleur ami. Petite sœur. Il répéta les mots dans sa tête à la manière d'un mantra.
Le problème, c'était que Paige Walker n'avait plus rien d'une petite fille. Il l'avait vue grandir sous ses yeux.Avec l'impression qu'elle était passée presque du jour au lendemain des T-shirts de famine et de la chambre d'hôpital pleine de peluches et de ballons de baudruche au stade maquillage et talons hauts. Finies les tenues de petite fille, et bienvenue à la lingerie Victoria's Secret.
***
Il se retourna et déglutit avec peine. Elle était venue vêtue d'un ensemble noir qui dessinait la finesse de sa taille et soulignait les courbes de ses hanches. Ses talons étaient hauts et ses cheveux - dont la couleur avait la richesse et la profondeur des meilleurs crus de chocolat - tombaient, longs, lisses et souples, sur le blanc de sa chemise. Une allure très business, l'image de quelqu'un de compétent et efficace. Et elle était 100% femme, surtout.
Il voulait la toucher.
Lui arracher tous ces vêtements sophistiqués et goûter jusqu'au plus secret de sa chair.
Bref, il était dans la merde. Et pas qu'un peu.
- Paige ?
Sous son maquillage impeccable, son visage était très pâle et elle paraissait épuisée, comme si elle n'avait pas dormi correctement depuis plusieurs jours.
Il voulait la prendre dans ses bras, la serrer fort et régler d'autorité tous ses problèmes. La tentation était si forte qu'il fit un pas en arrière.
Il était hors de question qu'il s'envoie la sœur de son meilleur ami.
***
Paige, elle, lui paraissait de nature à se briser dès le premier nid-de-poule. Or, s'il y avait un cœur qu'il se refusait à abîmer, c'était bien le sien. Il avait subi assez de dégâts comme ça par les soins de Mère Nature, avant qu'une bande de chirurgiens ne prenne le relais. C'était en tout cas le raisonnement qu'il se tenait.
- Alors, ça roule, pour Urban Génie ? Vous êtes très occupées ?
Les joues pâles de Paige virèrent au cramoisi.
- Et l'enterrement de vie de garçon ? Qu'est-ce que ça a donné ? Ça vous a ouvert des pistes ?
- Pas exactement, non.
Elle tripota le revers de sa veste.
- Ça n'a rien donné, en fait.
- Ah bon ? Pourquoi ?
Si seulement elle n'avait pas choisi ce rouge à lèvres corail si gai...
L'addiction aux rouges à lèvres de Paige ne datait pas d'hier et faisait sourire la plupart de ses amis. Pour lui, c'était un piège à libido de plus qui mettait sa force de volonté à rude épreuve. Car sa manie du rouge à lèvres attirait l'attention sur sa bouche - une partie de son anatomie sur laquelle il s'efforçait justement de ne pas s'appesantir.
Des bouches, il en avait embrassé plus qu'il n'aurait pu en faire le compte. Mais aucun de ces baisers n'avait laissé de trace marquante dans sa mémoire.
Alors que la bouche de Paige, qu'il n'avait jamais embrassée, restait une obsession constante.
***
- Il s'est passé tout ce que tu avais prévu qu'il se passerait. Donc, à moins que tu ne tiennes vraiment à en remettre une couche et à souligner que Matt et toi, vous m'aviez prévenue, je propose qu'on passe à la suite. Les détails sont sans intérêt. Disons juste que ça n'a pas été une réussite.
Il la vit serrer les poings.
- Qu'est-il arrivé, Paige ?
- Rien.
Il la connaissait assez pour savoir que ce « rien » voulait dire « beaucoup de choses ».
- Parle-moi un peu de ce rien.
- Tu vas péter un plomb et en faire tout un pataquès. Puis tu le répéteras à Matt qui pétera un plomb à son tour et en fera un pataquès pire encore. Si je voulais que Matt soit au courant, je serais assise en face de lui en ce moment.
- Je te promets de ne pas m'énerver.
- Ils réclamaient des prestations supplémentaires. De celles qui n'étaient pas indiquées sur notre liste. Voilà, c'est le moment de me faire remarquer que tu me l'avais bien dit. Ris un bon coup et on n'en parle plus.
Il n'avait jamais eu aussi peu envie de rire.
La colère se mit à bouillonner en lui.
- Ils t'ont fait des avances ?
Elle lui lança un regard d'avertissement.
- Attention, Jake. Tu m'as promis de rester calme.
- J'ai menti, murmura-t-il entre ses dents serrées. Et j'exige d'avoir tous les détails.
***
Des ombres dansèrent devant les yeux de Jake et sa vision s'obscurcit.
- Donne-moi leurs noms.
- Ne sois pas ridicule. Tu te prends pour qui ? Batman ? Tu veux leur mettre une raclée dans une ruelle obscure à la faveur de la nuit ? Je t'ai dit que nous avions repris le contrôle de la situation.
Penser à ce qui aurait pu arriver si cela n'avait pas été le cas lui faisait courir un filet de sueur glacée dans le dos.
- Vous n'auriez jamais dû vous mettre dans cette situation.
- Quelle situation ? On faisait notre travail, c'est tout. Nous sommes dans l'événementiel, si on nous propose d'organiser un événement, on organise. Qu'est-ce que tu aurais voulu qu'on fasse ? Qu'on n'accepte qu'une clientèle exclusivement féminine ? En restant toute la journée à la maison de crainte qu'il nous arrive quelque chose ?
Au son de sa voix, Jake comprit qu'elle était à deux doigts de craquer. Il prit une profonde inspiration. Il l'avait poussée à bout avec ses questions et ce n'était pas du tout ce qu'il voulait.
- C'est toi qui en fais un fromage, là. Je n'essaie pas de te protéger. Tout ce que je dis, c'est...
- ... que tu veux reprendre les choses en main et me défendre. Si ce n'est pas de la surprotection, qu'est-ce que c'est ?
Jake se frotta le front.


Avis :

 Je retrouve Sarah Morgan, une auteure de romance avec une nouvelle saga du nom de « Coup de foudre à Manhattan ». Ce premier volume est une belle surprise, porteur de messages existentiels. Après avoir lu les deux premiers tomes de sa trilogie « Les frères O’Neil », se déroulant au cœur de la montagne ; le choix de nous faire voyager en pleine ville dans cette nouvelle aventure est une façon de nous faire part d’un ailleurs, un style de vie peut-être différent ou similaire au nôtre. Encore une fois, Sarah se base sur des faits réels, tout en créant une histoire d’amour. Les accroches de ce roman se composent de raisonnements et d’observations profondes, avec des personnages travaillés et se complétant harmonieusement. En contrepartie, la narration est à la troisième personne du singulier, je ne suis pas encore convaincue par cette forme d’écriture ; elle me laisse souvent perplexe et légèrement indifférente aux émotions. Manhattan est à découvrir à travers les yeux de Paige, de Jake et de leur entourage, une histoire engagée sur la peur de l’inconnu et sur l’intime de soi.

Paige est une survivante, après une adolescence difficile où elle passait son temps dans les chambres aseptisées des hôpitaux et une famille beaucoup trop protectrice ; elle décide de prendre sa vie en main et de se réfugier dans la ville de New York. Elle est proche d’obtenir ce qu’elle souhaite, quand tout bascule, elle se relève une nouvelle fois avec l’aide, le soutien de ses deux meilleures amies. C’est une héroïne très indépendante, elle ne veut aucune assistance et tente de mener sa vie comme elle l’entend. Je me suis prise d’affection pour ses incertitudes et son besoin de contrôle, Paige fait écho en moi ; elle est le miroir des individus analysant tout, le rappel constant que l’inconnu peut nous rattraper à tout instant. Elle est le reflet de la détermination de réussir et de la force d’être elle-même, son évolution au cours du livre est très bien amenée ; une protagoniste avec le cœur sur la main, une intelligence certaine et une fougue pour la vie. Elle coupe le souffle, ses masques pour cacher ses émotions peuvent résonner en nous.

Jake Romano est le meilleur ami du frère de Paige, c’est aussi le dirigeant d’une grande entreprise. Au début, il paraît très fermé et mystérieux ; petit à petit, il s’ouvre sur son passé et je n’ai pas vraiment ressenti de peine pour lui, mais plutôt de l’admiration. Bien évidemment, c’est un héros aimant les femmes, et s’engager pour lui n’est pas dans ses projets. En vérité, il ne croit pas à l’amour, l’abandon qu’il a vécu en est la cause. Il identifie les sentiments comme étant source de perte, de souffrance et de complication. Dans un sens, ses arguments se comprennent, mais c’est aussi et particulièrement un héros têtu, avec des peurs qui le dévorent au point de faire abstraction de l’évidence. Il est plaisant sur plusieurs aspects ; sa loyauté incommensurable, son esprit vif, ses valeurs entières auprès de ses amis et de ses collaborateurs. C’est quelqu’un de passionné, à l’écoute et d’une franchise absolue sauf envers lui-même.

Mon plus grand plaisir dans ce genre de littérature, c’est toute l’enveloppe autour des deux personnages principaux. En effet, ils sont accompagnés par des amis, de la famille, à chaque instant. Du coup, la romance, même si c’est le thème de l’œuvre, n’est pas lassante ou présente sur chaque scène. Les complices de Paige sont extraordinaires, avec des personnalités totalement à l’opposée ; elles forment ensemble un trio attachant ; de ce fait, l’amitié est aussi un visage de ce récit. Malgré une fin sans surprises, en mode conte de fées ; l’ensemble du livre est captivant ; l’originalité se trouvant dans certains thèmes abordés, dans les développements intenses des relations entre les protagonistes, dans les questionnements de chacun d’entre eux et dans leur environnement et leurs situations. L’histoire d’amour entre Paige et Jake met une éternité à s’installer, c’est à la fois déroutant et intéressant ; c’est plutôt rare pour une romance. Entre eux, l’attirance est conflictuelle, l’une garde en souvenir son humiliation et l’autre ne souhaite pas lui faire de mal ; or, les envies ne s’éloignent pas et prennent de plus en plus de place au sein de leur rapport. Ceux-ci, au commencement, sont à la fois hostiles et amicaux. J’ai pris plaisir à suivre leur façon de se comporter ensemble, ils forment un couple chaleureux. Sur les émotions, je suis sceptique, j’ai ressenti quelques sautillements du cœur, le sourire se dessine de lui-même durant la lecture et les dialogues ont du sens au point de se répercuter en moi-même ; toutefois, les détails en surcharge triomphent sur les possibilités des sentiments à éprouver.

Je suis passée par différentes étapes avec la plume de l’auteure sur cet ouvrage. Sarah Morgan change vaguement son style d’écriture, plus enrichie sur le vocabulaire, la construction du texte et le déroulement du récit en lui-même. Cette métamorphose diffuse son talent, le révèle une nouvelle fois. Néanmoins, je suis réservée sur cette plume parfois sophistiquée, moins simple que dans sa saga précédente. Je regrette profondément la forme de la troisième personne du singulier, tout en connaissant la richesse qu’elle apporte à l’histoire. En effet, celle-ci est idéale pour changer de perspective sur les héros et pouvoir donner des informations plus externes. Sarah Morgan rehausse cette romance par des traits d’humour, une écriture toute en virtuosité, avec des passages sensuels, des interactions sur lesquelles la réflexion émerge.

« Nuit blanche à Manhattan » est peut-être une œuvre inattendue, sur le déroulement de l’histoire d’amour, sur l’écriture recherchée de l’auteure, sur la profondeur des personnages. Paige est vraiment le genre de femme moderne, capable de diriger une entreprise, de prendre des décisions par elle-même et de ne pas baisser les bras face aux épreuves. Son passé médical, ses combats, démontrent toute son envie de vivre. À propos de Jake, je l’ai apprécié sans tomber naturellement sous son charme ; sa perception de l’amour n’est pas la mienne alors je ne suis peut-être pas objectif avec lui. Dans les moments où il devient « sentimental », il est tout de même adorable et très appétissant comme homme ; ses faiblesses et ses qualités le font paraître humain. Une romance passionnante, bercée par des liens amicaux, des projets en construction et des peurs à dépasser. Au-delà d’une lecture peut-être futile pour certains, elle m’influence l’esprit ; j’en suis un peu déstabilisée. Un dénouement, certes, rapide et manquant de profondeur en comparaison du fond ; pourtant, je termine ce roman en étant apaisée. En dépit de mon bilan positif, je me sens à distance du coup de cœur, ou même d’une découverte majeure. La plume élaborée de Sarah Morgan, se différenciant de « Les frères O’Neil », m’a perturbée durant de nombreux chapitres, ces derniers s’allongent sur une quantité de pages et la narration choisie ne m’a pas totalement séduite. L’écriture est précise et animée, presque sans fausse note, seulement les émotions ne se libèrent pas véritablement.


Note :
8.5/10.

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