La Passe-miroir, Tome 1 : Les fiancés de l'hiver.

Titre : La Passe-miroir, Tome 1 : Les fiancés de l'hiver.

Auteur : Christelle Dabos.

Genre : Fantasy.

Edition : Gallimard.

Nombre de page : 519 pages.

Prix : 19€.

Résumé :

 Sous son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers : elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs. Elle vit paisiblement sur l'arche d'Anima quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons. La jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle. À quelle fin a-t-elle été choisie ? Pourquoi doit-elle dissimuler sa véritable identité ? Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d'un complot mortel.

Extrait :

 Un immense manteau noir, lugubre comme la mort, se détachait à peine sur la pénombre du couloir. Sans lunettes, Ophélie devinait plus Thorn qu'elle ne le voyait. Il avait vraiment une façon bien à lui d'engager la conversation...

Elle frissonna, encore somnolente, dans le courant d'air glacial de la porte, le temps de rassembler ses esprits.

- Je ne peux plus reculer, finit-elle par murmurer.

- Il est trop tard, en effet. Nous allons désormais devoir composer l'un avec l'autre.

Ophélie se frotta les yeux comme si cela pouvait l'aider à dissiper le voile de sa myopie, mais elle continuait de ne voir de Thorn qu'un grand manteau noir. Cela importait peu. Son intonation avait laissé assez clairement entendre à quel point cette perspective ne l'enchantait pas, ce qui comblait d'aise Ophélie.

Elle crut discerner l'ombre d'une valise pendue à son bras.

- Nous repartons déjà ?

- Je repars, rectifia le manteau. Vous, vous restez chez ma tante. Mon absence n'a que trop duré, je dois reprendre mes activités.

Ophélie s'aperçut soudain qu'elle ignorait toujours la situation de son fiancé. À force de le voir comme un chasseur, elle avait oublié de lui poser la question.

- Et en quoi vos activités consistent-elles ?

- Je travaille à l'intendance, s'impatienta-t-il. Mais je ne suis pas venu vous voir pour échanger des banalités, je suis pressé.

Ophélie ouvrit les paupières à demi. Elle n'arrivait tout simplement pas à imaginer Thorn en bureaucrate.

- Je vous écoute.

Thorn repoussa la porte vers Ophélie avec une telle brusquerie qu'il lui écrasa les orteils. Il fit tourner le verrou trois fois à vide pour lui en montrer le fonctionnement. Il la prenait vraiment pour une demeurée.

- À compter d'aujourd'hui, vous vous enfermez à double tour chaque nuit ; est-ce bien clair ? Vous n'avalez rien d'autre que ce qui vous est servi à table et, de grâce, veillez à ce que votre intarissable chaperon modère ses propos. Il n'est pas très intelligent d'offenser dame Berenilde sous son propre toit.

Bien que ce ne fût pas de bon goût, Ophélie ne put réprimer un bâillement.

- Est-ce un conseil ou une menace ?

Le grand manteau noir observa un silence, lourd comme du plomb.

- Ma tante est votre meilleure alliée, dit-il enfin. Ne quittez jamais sa protection, ne vous promenez nulle part sans sa permission, ne vous fiez à personne d'autre.

- « Personne d'autre », voilà qui vous inclut, non ?

Thorn renifla et lui referma la porte au nez. Il n'avait décidément pas le sens de la plaisanterie.

Avis :

 Sincèrement, ce n’est pas mon genre de prédilection. J’appréhende assez fortement les livres avec un univers aussi « imaginaire ». Pourtant, je suis enthousiaste de cette première lecture, une découverte surprenante. Certes, je me suis souvent perdue dans les descriptions et les informations ; mais cela reste une très belle richesse. Une porte ouverte pour rentrer dans le monde de l’auteur. Par contre, je n’ai pas vraiment cerné l’intrigue — qui sont les vrais méchants, qui sont les vrais gentils ? Rien n’est certain avec ce volume d’introduction. Énormément de mystère, peu de révélations. Les secrets, non-dits et complots s’empilent les uns sur les autres ; jusqu’à me déstabiliser sur plusieurs chapitres. C’est un roman complexe, créatif ; les mondes peuvent se mélanger dans notre tête, tout comme les « familles ».

Ophélie est une Animiste, elle possède deux pouvoirs ; lire les objets à travers ses mains et traverser les miroirs. Au début, elle chuchote, se fait toute petite, ne prend pas soin d’elle et accorde plus d’importance aux objets qu’aux gens. Elle doit se marier avec un inconnu, quitter sa famille et atterrir dans une arche nouvelle. Pour découvrir un endroit où tout est illusion, où elle ne peut faire confiance à personne, où les pouvoirs peuvent être terrifiants, et où la manipulation et les crimes sont courants. Elle est parfois passive, sauf qu’elle cherche la liberté et une indépendance à toute épreuve. Vers la fin de ce livre, son caractère prend forme, pour dévoiler une jeune femme sûre d’elle, se battre contre cette vie, qu’elle n’a pas souhaitée. Toutefois, je ne me suis pas franchement attachée à cette héroïne.

Thorn, c’est le futur époux d’Ophélie. Je ne comprends pas son absence majeure dans le récit, certes il fait des apparitions ; elles sont légères pour un personnage sûrement principal. Donc, je ne me suis pas prise d’affection pour lui et sa personnalité est très difficile à cerner. Cependant, c’est un héros intéressant, il rajoute très certainement du piment. Je trouve cet homme passionnant, malgré son indifférence profonde. La question est, a-t-il des sentiments pour sa fiancée ? Thorn ne ressent pas d’attachement pour les êtres qui l’entourent. Mais, est-il réellement un sans cœur ? À suivre dans les prochains tomes.

Une fantasy jeunesse, pleine de rebondissements. L’intrigue se traîne tout de même en longueur, et ne révèle que le strict minimum. Parfois, l’histoire semble plate ; pauvre en action. Le suspense est présent jusqu’à la dernière ligne de ce premier opus, me laissant un goût un peu amer ; avec une impression d’inachevée sur « Les fiancés de l’hiver ». L’univers est riche, dès le départ je me suis laissée surprendre et emportée. Découvrir un monde entièrement imaginaire n’est peut-être pas mon style préféré, néanmoins je vais garder un bon souvenir de ce voyage illusoire à travers le Pôle. La catégorie de cette œuvre n’offre pas d’émotion, quoi qu’il en soit j’ai ressenti certaines sensations ; principalement du ressentiment. En effet, les mariages arrangés et le fait de se servir d’une personne pour aboutir à un projet ; je ne l’accepte pas. De plus Berenilde, la tante de Thorn m’a plusieurs fois agacé. Bien évidemment, il ne faut pas se fier aux apparences avec ce roman.

Christelle Dabos nous emmène complètement ailleurs, dans une sphère originale et inédite. Par contre, sa plume dénote avec l’esprit « jeunesse » de cet univers. Une écriture soutenue, avec un vocabulaire aiguisé. Certes, il y a du rythme, malheureusement les détails en long, en large et en travers peuvent déconnecter certain lecteur. Mais j’ai apprécié cette parenthèse imaginaire, un beau partage de l’écrivain de sa créativité.

Bref, une bonne lecture. Le succès de ce livre ne fonctionne pas encore sur moi, je pense clairement que l’univers me réserve des surprises incroyables. Malgré tout, ce premier volume est une introduction de mon point de vue, je n’ai pas réussi à entrer dans l’intrigue et ses péripéties. Les personnages paraissent flottants, un peu comme des fantômes ou des robots. Entre Ophélie, fataliste sur les trois quarts du roman ; et Thorn éperdument absent durant l’histoire. Impossible, donc, de m’attacher à ces héros, pour l’instant. Christelle Dabos possède une imagination débordante et talentueuse, avec une belle plume sans qu’elle soit « harmonieuse ». Le mystère est à la fois un point fort, tout en étant un point faible. J’ai récolté les informations pour ensuite me retrouver sans aucune vérité importante pour la suite. Du suspense presque enraciné dans le récit. Classé dans la littérature jeunesse, je doute clairement pour mettre cet ouvrage entre les mains de tous les adolescents, l’écriture est parfois trop recherchée.

Note :

7.5/10.